La Bataille de Cambrai

En novembre 1917, Cambrai va assister à une courte et sanglante bataille qui marquera un tournant décisif de la Première Guerre mondiale.

 

En novembre 1917, Cambrai va assister à une courte et sanglante bataille qui marquera un tournant décisif de la Première Guerre mondiale. En effet, la " Bataille de Cambrai " met en évidence la fin de la cavalerie et s'ouvre à la guerre moderne grâce à l'action conjuguée des tanks et de l'aviation. Elle met en présence la troisième armée britannique commandée par le Général Sir Julian Byng qui comprend 7 divisions d'infanterie et le Tank Corps, constitué de 3.500 hommes et 690 officiers, est dirigé par le Brigadier Général Elles. Face aux forces alliées, la deuxième armée allemande du Général Von der Marwitz comprend trois divisions au début de la bataille. Chaque division allemande ou alliée comprenait un effectif compris entre 10.000 et 20.000 hommes.

 

Contexte historique 

en 1916, suite aux lourdes pertes engendrées par la Bataille de la Somme, l'armée allemande décide un repli stratégique à l'arrière d'un front puissamment fortifié raccourci d'une soixantaine de kilomètres : la ligne Hindenburg. Cet ouvrage, constitué de trois positions, est construit dès le mois de septembre par les prisonniers russes et les colonnes ouvrières. S'étendant sur plus d'une dizaine de kilomètres de profondeur, il est constitué de larges tranchées mises en lignes parallèles renforcées de nombreux blockhaus. Ce dispositif est complété par d'importants réseaux de fils de fer barbelés. Toutes les lignes sont réunies par des sapes. C'est la plus impressionnante fortification d'Europe. Celle-ci n'est pas une barrière rigide mais un réseau de mailles élastiques où l'assaillant s'engouffre et en sort épuisé par le principe de contre-offensive en profondeur.

Cambrai, occupée dès la fin du mois d'août 1914, est une place forte de la ligne Hindenburg. Son réseau ferroviaire et routier permet d'assurer le ravitaillement des troupes allemandes positionnées entre Arras et Saint-Quentin. 

Après les déboires de la Bataille d'Ypres et pour redonner moral à ses troupes, le Maréchal Douglas Haig accepte la proposition du Tank Corps  de lancer un raid de chars sur Cambrai afin de percer la ligne Hindenburg. C'est aussi le moyen de montrer l'efficacité de ce nouvel engin de guerre inconnu des allemands à cette époque. Le lieutenant-colonel Fuller dirige l'offensive qui doit par un mouvement tenaille isoler Cambrai et prendre les hauteurs de Bourlon permettant la progression vers la Sensée. L'attaque doit être brève et consiste  sur un front réduit (moins de 10 kilomètres), de percer, frapper et se retirer. Plus de 476 tanks sont utilisés durant cette bataille : 378 chars de combat, 54 pour le ravitaillement, 32 munis de grappins nettoient le terrain, 2 pour servir de pont à la cavalerie, 9 chars radio et 1 pour le matériel. Leur action combinée avec l'aviation, les chars d'assaut, l'infanterie et la cavalerie permet de transformer la stratégie de guerre de position en guerre de mouvements.

 

Préparatifs de la bataille

En novembre 1917, le front devant Cambrai est relativement calme, le terrain encore intact est propice à l'évolution des tanks. Pour bénéficier de l'effet de surprise, les préparatifs ont lieu dans le plus grand secret, même l'armée française n'est pas informée de cette opération. Pour laisser le champs libre, les soldats français sont envoyés sur le front de Péronne.

Les pionniers de l'aviation vont également participer aux préparatifs de cette bataille. En effet, l'observation aérienne va permettre d'établir des cartes extrêmement précises sur la ligne Hindenburg et les positions d'artillerie. Cependant, il n'y aura pas de vol de reconnaissance afin d'éviter l'éveil de tout soupçon.

Les tanks, fabriqués à Lincoln, en Angleterre, par la société Foster, sont débarqués au Havre puis acheminés aux ateliers mécaniques d'Erin près d'Abbeville. C'est au sud d'Albert que les soldats du Tank Corps vont apprendre à les manœuvrer. L'équipage est constitué de 8 hommes : un conducteur, un chef de bord-mitrailleur avant, deux canonniers, deux mitrailleurs arrière, deux changeurs de vitesse également pourvoyeurs en munitions.

Pour la Bataille de Cambrai, les tanks sont acheminés par voies ferrées dans les gares de Gouzeaucourt, Fins, Ytres, Heudicourt, puis dissimulés dans les bois environnants en particulier le bois d'Havrincourt. Ils sont répartis en 9 bataillons de 42 chars, qui ont chacun un objectif à atteindre.

La progression s'effectue grâce aux tanks qui avancent par trois : un char mâle en tête, suivit par deux chars femelles. Ils nettoient le terrain et franchissent les tranchées après avoir jeté leurs fascines, l'infanterie suit les tanks, la cavalerie vient ensuite.

 

Déroulement de la bataille

Le 20 novembre 1917, à 6h10 du matin, les tanks entrent dans le no man's land, des bombes fumigènes de l'artillerie anglaise masquent l'avance des blindés. L'avancée se fait assez rapidement traversant les lignes des avant-postes, puis la ligne principale, seule Flesquières résiste, l'artillerie allemande met 16 chars hors de combat. Cependant, le franchissement du canal de Saint-Quentin bloque l'avancée des Alliés, comme à Masnières où le pont miné s'effondre sous le poids du premier tank, le Flying Fox II, bloquant toute avancée de l'infanterie. Au soir du premier jour, les Alliés ont pénétré les lignes allemandes sur une profondeur de 8 à 9 kilomètres, les pertes sont relativement faibles puisqu'elles ne dépassent pas 8% des effectifs engagés soit, cependant, la mort de 118 officiers et 530 hommes d'équipage. 179 tanks sont mis hors de combat soit touchés par l'ennemi, soit par ennuis mécaniques. C'est pourtant une victoire et, sur l'ordre du Roi, pour la première et seule fois de la guerre, toutes les cloches de Londres vont sonner en honneur de la 3ème armée britannique du général Byng : c'est le Cambrai's days toujours commémoré aujourd'hui.

Malheureusement, le franchissement du canal reste un problème et Cambrai ne sera pas libéré. Après la prise de Flesquières, les combats se poursuivent vers Bourlon, le village est pris, puis repris. Les troupes anglaises sont exténuées et manquent de renfort. A partir du 23 novembre, les 140 tanks épargnés doivent rentrer, le combat piétine. De la guerre de mouvement on passe à la guerre de position, aux affrontements directs, aux lourdes pertes, sans gain appréciable de terrain.

Le 26 novembre, la 4ème armée allemande provenant du front russe arrive en renfort, il s'en suit une contre-offensive qui débute le 30 novembre. Reprenant  le système de tenaille, deux attaques sont mises en place, l'une part de Bourlon, l'autre de Banteux. Tous les calibres de la 2ème armée allemande sont utilisés, mais l'armée britannique résiste. Dans cette lutte acharnée, les pertes sont terribles de part et d'autre. La riposte est cinglante. Les Alliés ne peuvent résister longtemps à cette nouvelle offensive et se replient le 4 décembre au matin. Il ne reste plus rien des villages concernés, ils sont rayés de la carte, d'après le communiqué officiel du 4 XII 1917, " il ne reste plus qu'un éboulis de ruines sanglantes aux briques pulvérisées. "

 

Bilan de la Bataille de Cambrai

Après 13 jours de durs combats, il n'y a ni vainqueur, ni vaincu. La ligne de front reste sensiblement la même. Flesquières et Ribécourt sont aux Anglais, mais Villers-Guislain est perdu. Les pertes sont sensiblement les mêmes dans les deux camps : 44.200 Alliés pour 50.000 Allemands mis hors de combat.

Ainsi, la Bataille de Cambrai donne naissance à la guerre moderne qui met en évidence l'utilisation des tanks et de l'aviation, mais également qui marque la fin de la cavalerie. Les grands principes tactiques mis en œuvre lors de la bataille, conçus par le colonel Fuller, vont désormais servir de référence, comme la bataille de Villers-Bretonneux les 8 et 9 août 1918.

 

Un témoin de la bataille a été retrouvé en 1998: un char Mark IV nommé "Deborah" : 

https://www.tourisme-cambresis.fr/tank-flesquieres.html
 

Un musée lui sert d'écrin depuis 2017 : https://www.tourisme-cambresis.fr/cambrai-tank-1917